Le divorce pour faute

Le divorce pour faute est défini par l’article 242 du code civil comme étant celui qui « peut être demandé par l’un des époux lorsque des faits constitutifs d’une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune. »

I. La faute

A. Définition de la faute

La faute est donc définie comme la violation des devoirs et obligations du mariage.

Les devoirs et obligations du mariage sont quant à eux définis par les articles 212 à 215 du code civil, aux termes desquels les époux :

– se doivent mutuellement respect, fidélité, secours et assistance,

– assurent ensemble la direction morale et matérielle de la famille, et pourvoient à l’éducation des enfants et préparent leur avenir,

– contribuent aux charges du mariage, à proportion de leurs facultés respectives, sauf conventions matrimoniales contraires,

– s’obligent mutuellement à une communauté de vie.

Peuvent ainsi être considérés comme constitutifs d’une faute les faits suivants :

– l’adultère et l’infidélité,

– le désintérêt pour la famille,

– le défaut de soins ou d’attention à l’égard des enfants,

– l’abandon de domicile conjugal.

Ces fautes possibles ne sont toutefois que des exemples.

En effet, les juges du fond apprécient souverainement les faits afin de déterminer l’existence d’une violation des devoirs et obligations du mariage.

En outre, au-delà des devoirs et obligations expressément nommés par le législateur, d’autres devoirs et obligations s’ajoutent, dont la violation peut constituer une faute.

Il s’agit, selon une expression doctrinale, de « devoirs dont sont tissés l’ordre conjugal et la paix des ménages ». Ils sont appelés les devoirs innommés.

Peuvent ainsi constituer une faute certaines violences ou certains comportements désobligeants, étant rappelé que les juges du fond apprécient souverainement les faits.

B. L’imputabilité de la faute

La faute doit pouvoir être imputable à l’un des époux.

Ainsi, la jurisprudence exige l’existence d’un élément intentionnel.

Le conjoint fautif doit donc être conscient de sa faute.

Les juges du fond conservent également à cet égard un pouvoir souverain d’appréciation des faits qui leur sont soumis.

Toutefois, la jurisprudence est relativement exigeante en la matière, et impose une altération très grave du discernement du conjoint pour que soit exlue l’imputabilité du comportement fautif.

C. Les caractères de la faute

La violation doit être :

– grave ou renouvelée

– et rendre intolérable le maintien de la vie commune.

La loi implique donc une certaine gravité du comportement ou de l’acte reproché pour que la faute puisse être retenue.

Ces caractères sont appréciés par les juges du fond.

En outre, cette définition implique que réconciliation, pour peu qu’elle soit réelle, entraîne la caducité de la procédure.

Enfin, le législateur prévoit que les fautes de l’époux qui a pris l’initiative du divorce n’empêchent pas d’examiner sa demande. Toutefois, dans ce cas, le caractère de gravité des faits reprochés à l’autre époux peut alors être diminué.

II. La procédure

A. L’initiative du divorce et la saisine du Juge aux affaires familiales (JAF)

L’un des époux prend l’initiative du divorce, par le biais de la requête en divorce, laquelle doit être déposée au greffe du Tribunal de grande instance (TGI) par l’avocat représentant l’époux demandeur.

La requête ne doit pas indiquer les motifs du divorce.

Cette requête saisit le JAF.

Ce dernier peut prendre, dès la requête, des mesures d’urgence, telles que :

– autoriser l’époux demander à résider séparément, et s’il y a lieu avec ses enfants mineurs,

– ordonner toutes mesures conservatoire telles que l’apposition de scellés sur les biens communs.

Le JAF peut également prescrire toutes mesures urgentes que requièrent les intérêts de la famille, et notamment interdire à cet époux de faire, sans le consentement de l’autre, des actes de disposition sur ses propres biens ou sur ceux de la communauté, meubles ou immeubles. Il peut aussi interdire le déplacement des meubles, sauf à spécifier ceux dont il attribue l’usage personnel à l’un ou à l’autre des conjoints.

Enfin, il existe une procédure de « référé-violence », utilisable dans la situtation où les violences exercées par l’un des époux mettent en danger son conjoint, un ou plusieurs enfants, aux termes de laquelle le JAF peut statuer sur la résidence séparée des époux en précisant lequel des deux continuera à résider dans le logement conjugal. Sauf circonstances particulières, la jouissance de ce logement est attribuée au conjoint qui n’est pas l’auteur des violences. Le juge se prononce, s’il y a lieu, sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale et sur la contribution aux charges du mariage. Les mesures prises sont caduques si, à l’expiration d’un délai de 4 mois à compter de leur prononcé, aucune requête en divorce ou en séparation de corps n’a été déposée.

La durée des autres mesures prises par le JAF doit être déterminée et ne saurait, prolongation éventuellement comprise, dépasser 3 ans.

B. L’audience sur tentative de conciliation

Le JAF rend une ordonnance fixant l’audience sur tentative de conciliation.

Le greffe du TGI convoque l’époux qui n’a pas présenté la requête à l’audience sur tentative de concilation, par lettre recommandée avec accusé de réception accompagnée d’une copie de l’ordonnance fixant l’audience, confirmée le même jour par lettre simple, au moins 15 jours à l’avance, sous peine de nullité.

Les époux doivent en principe être assistés chacun par un avocat. En effet, l’assistance d’un avocat est obligatoire pour accepter, lors de l’audience de conciliation, le principe de la rupture du mariage.

Le greffe avise l’avocat de l’époux qui a présenté la requête.

Pendant l’audience, le juge vérifie la recevabilité de la requête et sa compétence.

Puis il s’entretient avec les époux séparément, en commençant par le demandeur.

S’il constate que le demandeur maintient sa demande, il rend une ordonnance sur tentative de conciliation, par laquelle il peut soit renvoyer à une nouvelle tentative de conciliation, soit autoriser immédiatement les époux à introduire l’instance en divorce.

Il peut en outre ordonner des mesures nécessaires pour assurer l’existence des époux et celle des enfants jusqu’à la date à laquelle le jugement sera rendu et aura force de chose jugée.

Il peut notamment :

– proposer aux époux une mesure de médiation et, après avoir recueilli leur accord, désigner un médiateur familial pour y procéder,

– enjoindre aux époux de rencontrer un médiateur familial qui les informera sur l’objet et le déroulement de la médiation,

-statuer sur les modalités de la résidence séparée des époux,

– attribuer à l’un d’eux la jouissance du logement et du mobilier du ménage ou partager entre eux cette jouissance, en précisant son caractère gratuit ou non et, le cas échéant, en constatant l’accord des époux sur le montant d’une indemnité d’occupation,

– ordonner la remise des vêtements et objets personnels,

– fixer la pension alimentaire et la provision pour frais d’instance que l’un des époux devra verser à son conjoint, désigner celui ou ceux des époux qui devront assurer le règlement provisoire de tout ou partie des dettes,

– accorder à l’un des époux des provisions à valoir sur ses droits dans la liquidation du régime matrimonial si la situation le rend nécessaire,

– statuer sur l’attribution de la jouissance ou de la gestion des biens communs ou indivis autres que le logement et le mobilier du ménage, sous réserve des droits de chacun des époux dans la liquidation du régime matrimonial,

– désigner tout professionnel qualifié en vue de dresser un inventaire estimatif ou de faire des propositions quant au règlement des intérêts pécuniaires des époux,

– désigner un notaire en vue d’élaborer un projet de liquidation du régime matrimonial et de formation des lots à partager.

C. L’assignation

Dans les 3 mois du prononcé de l’ordonnance sur tentative de conciliation, seul l’époux qui a présenté la requête initiale peut assigner en divorce.

En outre, en cas de réconciliation des époux ou si l’instance n’a pas été introduite dans les 30 mois du prononcé de l’ordonnance sur tentative de conciliation, toutes les dispositions de cette dernière sont caduques, y compris l’autorisation d’introduire l’instance.

L’acte d’assignation mentionne le cas de divorce choisi, soit, en l’occurrence, le divorce pour faute.

A peine d’irrecevabilité, il doit comporter une proposition de règlement des intérêts pécuniaires et patrimoniaux des époux.

L’époux qui n’est pas à l’origine de la demande a la possibilité de présenter une demande concurrente.

D. Le jugement de divorce

Le juge statue sur la demande en divorce.

Si une demande pour altération définitive du lien conjugal et une demande pour faute sont concurremment présentées, le juge examine en premier lieu la demande pour faute.

S’il rejette celle-ci, le juge statue sur la demande en divorce pour altération définitive du lien conjugal.

Le JAF rend ensuite son jugement.

Ce dernier se prononce sur le divorce.

Il contient également les mesures accessoires, relatives notamment à l’exercice de l’autorité parentale ou au versement d’une prestation compensatoire, sur lesquelles le JAF aura tranché au vu des demandes respectives de chacun des époux.

La particularité du divorce pour faute réside notamment dans le fait que le JAF statue sur les torts des époux.

Lorsque des fautes ont été invoquées par une des parties dans le cadre d’une demande reconventionnelle en et que le JAF accueille les 2 demandes, ce dernier peut prononcer le divorce aux torts partagés. En outre, même en l’absence de demande reconventionnelle, le divorce peut être prononcé aux torts partagés des 2 époux si les débats font apparaître des torts à la charge de l’un et de l’autre.

A la demande des conjoints, le juge peut se limiter à constater dans les motifs du jugement qu’il existe des faits constituant une cause de divorce, sans avoir à énoncer les torts et griefs des parties. Cette demande doit être formulée de façon expresse et concordante dans les conclusions de l’un et l’autre époux. Dans ce cas, le JAF se borne à constater qu’il existe les faits constitutifs d’une cause de divorce.

Le jugement doit contenir, dans son dispositif, la mention de la date de l’ordonnance sur tentative de conciliation.

Le jugement est ensuite notifié aux parties.

Il est susceptible d’appel dans un délai de 15 jours à compter de sa notification. Passé ce délai, et en l’absence de recours, il a force de chose jugée.